« Comment enlever les murs qui séparent nos maisons ? » Voilà la question que sœur Agnès Ploix lança pendant notre premier colloque interreligieux organisé en 2002 sur le thème : « Religion, paix et non-violence ».
En réponse à son engagement et à son amour, nous devons tous répondre inlassablement à sa question. Le 19 novembre 2006, sœur Agnès était notre modératrice pour l'un des trois colloques tenus autour du thème de « l'autre ».

Elle dirigeait les débats avec beauté, bonté, intelligence et y mettait tout son cœur. En hommage à sœur Agnès, dont nous avons tristement appris le décès en avril 2007, voici un témoignage d'Hassan Ferechtian qui l'a côtoyée lors des différents colloques : « Quand elle parle d'aimer et d'amour, ses yeux brillent, sa voix baisse, elle devient comme une jeune fille adolescente devant son premier amour. Elle parle d' "amour" comme une amoureuse ! » Pour ma part, elle incarnera pour l'éternité une femme d'une dignité exemplaire, un exemple à suivre pour beaucoup d'hommes.

Comment participer à l'amélioration du bonheur individuel, à l'autonomie, à la confiance en soi dans un contexte où la croissance économique et la quantité prévalent sur la qualité ?

Dans un écrit de Nichiren Daishonin, on trouve cette phrase : « La joie résulte de la sagesse et de la bienveillance partagée. » Dans ce texte1 , il parle d'un véritable bonheur qui consiste à devenir heureux en même temps que les autres ; la joie est quelque chose que nous partageons avec les autres.

Ces moments de joie, comme ces moments de peines, nous aident à renforcer notre humanité et à développer sagesse et bienveillance. Quand nous ne partageons plus ces moments, notre cœur se vide, il devient creux, comme une coquille vide facile à briser.
Voici ce que nous dit Hervé élie Bokobsa en parlant de l'amour du prochain : « C'est en reconnaissant les obstacles liés à l'amour de l'autre, de tout autre, qu'il sera possible de se donner les moyens de l'appliquer dans notre vie quotidienne. »

En parallèle, voici ce qu'écrivait Daisaku Ikeda dans ses Propositions pour la paix du 26 janvier 2004 : « Le soi nécessite l'existence de l'autre. Nous ne pouvons pas nous impliquer avec d'autres, d'une manière efficace et productive, s'il nous manque la tension intérieure, la volonté et l'énergie spirituelle de guider et contrôler nos émotions. C'est en reconnaissant ce qui est différent et extérieur à nous, en ressentant la résistance opposée, que nous sommes contraints à exercer la maîtrise de soi qui permet à notre humanité de s'épanouir : Perdre l'autre de vue revient ainsi à miner toute notre expérience du moi. »2

Au colloque qui s'est déroulé à Nantes, Simone de Bollardière, veuve du général de Bollardière3, nous a envoyé ce message : « Si on ne se connaît pas, on se diabolise facilement: l'autre devient alors un ennemi. Il est donc très important de tisser des liens entre nous tous. Bien que nous soyons tous différents, chacun a des besoins fondamentaux comme l'amour, l'eau, la nourriture et un toit pour s'abriter. Plus on tisse des liens entre personnes différentes, plus on apprend à se connaître, plus on avance sur le chemin de la paix et de la justice. Ce que vous faites aujourd'hui est donc très important. »

Enfin, j'aimerais citer un libre penseur, Claude Launay, qui est intervenu à Nantes : « La laïcité est souvent mal comprise. Ce n’est pas être contre la religion mais les admettre toutes. Cette idée a pris forme au siècle des Lumières et a mis longtemps à mûrir ; à s'épanouir. Les concepts sont des notions qui mettent beaucoup de temps à s'établir. De la même façon, il faut espérer la tolérance religieuse, car la réalisation de la paix en dépend. »

Pour introduire la lecture des quatre colloques réunis dans ce livre, je commencerai par remercier nos invités pour la confiance qu'ils nous ont témoignée, certains pour la première fois et d'autres depuis le début de nos rencontres en 2001. Entre les lignes de ces colloques, il existe une charpente maintenant bien solide qui s'est construite pas à pas par des rencontres régulières. Les liens solides entre les personnes qui ont préparé ces rencontres, les ont animés et encouragés, ont créé concrètement cette culture de paix que nous voyons chaque année s'élargir. Je tiens à exprimer ma plus grande reconnaissance à toutes ces personnes qui ont aidé à ces rencontres et donc à « découvrir l'autre en soi, et découvrir soi en l'autre ».

Notes

  • 1. Nichiren Daishonin Gosho Zenshu (oeuvres complètes de Nichiren Daishonin), p. 761, Tokyo : Soka Gakkai, 1952.
  • 2. Discours et entretiens de Daisaku Ikeda n° 149, mai 2004, p. 15, ACEP.
  • 3. Jacques Pâris de Bollardière (1907-1986), combattant de la Seconde Guerre mondiale, de la guerre d'Indochine et de la guerre d'Algérie, est également une des figures de la non-violence en France.

 
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